Un intersigne est un lien mystérieux établi entre deux faits qui se produisent au même moment, souvent à de grandes distances l’un de l’autre, et dont l’un est considéré comme le pronostic de l’autre ; ainsi le portrait d’une personne aimée se détache de la muraille, et l’on apprend qu’au même moment cette personne est morte. Car si les intersignes annoncent la mort, la personne à qui se manifeste l’intersigne est rarement celle que la mort menace.

Anatole Le Braz (« la légende de la mort ») affirme que « personne ne meurt, sans que quelqu’un de ses proches, de ses amis ou de ses voisins n’en ait été prévenu par un intersigne. Les intersignes sont comme l’ombre, projetée en avant, de ce qui doit arriver. »

les Intersignes les plus courants sont des coups semblant être frappés depuis l’intérieur des murs, des bruits de pas dans une pièce vide, des mains qui étreignent ou tirent violemment des couvertures, des chandelles qui s’éteignent subitement, des gouttes de sang courant sur les murs, une pendule qui s’arrête. Il est autant à penser que la majorité des phénomènes décrits comme « paranormaux », découlant de la mort d’un membre de la famille, ne sont que le résultat d’intersignes n’ayant pas été compris et analysés comme tel.

Toujours selon A. Le Braz, « si nous étions moins préoccupés de ce que nous faisons ou de ce qui se fait autour de nous en ce monde, nous serions au courant de presque tout ce qui se passe dans l’autre ». Evidemment, il est toujours commode de rationaliser et de parler de « coïncidences » ; Il n’en reste pas moins que « les personnes qui nient les intersignes en ont autant que celles qui en ont le plus. Elles les nient uniquement parce qu’elles ne savent ni les voir, ni les entendre ; peut-être aussi parce qu’elles les craignent et qu’elles ne veulent rien entendre ni rien voir de l’autre vie. » La nature humaine étant ce qu’elle est, ces propos écrits en 1893 restent étonnamment actuels !

L’idée d’un lien mystérieux entre des choses ou des évènements est loin d’être circonscrite à une Bretagne superstitieuse et surannée, comme nous allons le voir tout de suite :

Dans sa fameuse « table d’émeraude »,  Hermès Trismégiste, fondateur mythique de l’alchimie, postule la correspondance entre le macrocosme et le microcosme : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ».

Baudelaire, dans son poème « correspondances », lui fait écho :

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

 

Quittons le domaine des mythes et de la poésie pour nous intéresser au sciences sociales, et plus particulièrement au structuralisme, dont le Larousse donne la définition suivante  : « Courant de pensée des années 1960, visant à privilégier d’une part la totalité par rapport à l’individu, d’autre part la synchronicité des faits plutôt que leur évolution, et enfin les relations qui unissent ces faits plutôt que les faits eux-mêmes dans leur caractère hétérogène et anecdotique. »

 

Encore plus fort, la physique quantique permet elle aussi d’appréhender les intersignes :

La non-séparabilité encore appelé effet EPR (pour Einstein Podolski Rosen) est un phénomène quantique désormais solidement établi sur le plan expérimental (notamment par l’équipe française d’Alain Aspect en 1983) qui heurte le sens commun : elle remet en cause l’idée de localité des objets, qui semble pourtant aller de soi. Expliquons nous:

Imaginons deux particules qui interagissent puis s’éloignent l’un de l’autre : Ces deux particules  jumelles sont dites corrélées, c’est à dire forment un ensemble inséparable, même si elles sont infiniment éloignées. Cela a des conséquences révolutionnaires sur notre vision du monde:

  • Deux particules corrélées forment un tout quelque soit leur distance de séparation
  • La connaissance de l’une influe sur l’autre instantanément, sans transmission d’information résultant d’une action physique.

L’interprétation de la non-séparabilité est très délicate pour le moment et les hypothèses les plus folles ont été émises par les physiciens:

  • La première particule mesurée remonte-t-elle le temps pour prévenir sa jumelle de l’état qu’elle doit adopter?
  • Existe-t-il une sorte de télépathie instantanée entre particules?
  • y a-t-il une « totalité indivisible » de l’Univers?

Laissons le mot de la fin à Etienne Klein, physicien au CEA et enseignant à l’Ecole Centrale, qui voit dans l’effet EPR l’assise théorique du romantisme: deux cœurs qui ont interagi dans le passé ne peuvent plus être considérés de la même manière que s’ils ne s’étaient jamais rencontrés. Marqués à jamais par leur rencontre, ils forment un tout inséparable…